Yangpachen-Nyemo


carte jour 21
Résumé=Nous traversons Yangpachen et remontons une vallée sauvage jusqu'au monastère de même nom. Suit un col au froid glacial avant de redescendre dans une vallée tempérée et agréable où nous découvrons encore 3 monastères et une grande foule de pélerins dans les environs de Nyemo.


Nous nous levons alors que la température est devenue hivernale. Il tombe de la neige fondue. Au lieu de suivre la route de l'Est en obliquant à droite nous allons prendre une route qui prend la direction du Nord et traverser l'ancien village de Yangpachen qui est bordé par une partie des installations de l'usine géothermique. Après avoir traversé le village la route oblique sur la gauche (vers l'Ouest) pour remonter une vallée. L'horizon est limité car une brume coupe toute visibilité au-delà de 300 à 500 mètres. A 2 kilomètres du village, nous apercevons au milieu de la plaine, à 500m à notre gauche, des derricks qui captent la vapeur en sous-sol et alimentent l'usine géothermique. Il tombe toujours de la neige fondue et nous sommes transis de froid à l'intérieur du Toyota.

Nous recherchons le monastère de Yangpachen et avons peur de le manquer. La route est rectiligne au milieu d'une très large plaine dont nous ne discernons pas les limites à cause de la faible visibilité. C'est au moment où la route s'approche d'une grande colline sur notre droite que nous apercevons les premières maisons d'un village, et au sommet de la butte, l'enceinte du monastère surmontée de lungtas.


Un petit chemin gravit cette butte et nous arrivons dans la cour du monastère.

L'heure est matinale et tous les moines ne sont pas encore descendus à l'intérieur du Dukhang. Après que nous ayons visité les lieux, la neige s'est arrêtée de tomber mais le soleil a du mal à percer la couche nuageuse. Les moines arrivent en désordre et après un quart d'heure, les récitations de textes sacrés peuvent débuter.

Un jeune moine passe et repasse avec son grand thermos rempli de thé tibétain et un autre avec un petit sac contenant la farine d'orge grillée. Nous restons pour prier avec eux près d'une heure environ puis, à contre coeur, nous reprenons la route qui a l'aspect d'un grand serpent noir au milieu d'un paysage hivernal blanc.

Par instant nous entrevoyons les montagnes aux cîmes enneigées qui nous entourent et la route monte régulièrement vers le col de Shoggu la. Le paysage prend l'aspect des hauts plateaux tibétains avec ici et là quelques troupeaux de yaks dispersés à la recherche de leur nourriture sous le manteau de neige.

A 5200m, nous nous arrêtons au bord de la route pour photographier une tente qui se trouve à 200m à droite de la route. Le ciel bleu transparaît par instants au milieu des nuages. Deux enfants viennent par curiosité pour nous saluer. Le plus jeune porte de grosses lunettes pour protéger sa vue car ici la luminosité réfléchie par la neige est insupportable.


Le drokpa vient vers nous et nous invite à prendre le thé.


Nous nous dirigeons vers la tente. Il nous dit que nous sommes le premier véhicule de tourisme qui passe le col depuis la fin de l'hiver.


Nous photographions l'intérieur de la tente, 6/8 mètres carrés, avec quelques paillasses, une bouilloire au centre calée sur trois grosses pierres, et des sacs contenant des ustensiles, des outils et des vêtements.


Dans un enclos, à une vingtaine de mètres, une dizaine de yaks et quelques chevaux sont entravés et reliés à une chaîne fixée au sol - qui fait un carré.


Ces gens ont de grands sourires, ils nous font asseoir et nous offrent du thé, de la tsampa et de la viande de yak séchée.

Ils dégagent une certaine noblesse et nous comprenons de suite que leur donner la pièce serait les offenser, même les enfants. Il y a chez ceux-ci comme chez ceux que nous avons croisés dans les monastères une grande dignité, peut être même une maturité que nous ne rencontrons pas chez nos enfants qui sont hyper protégés. L'homme et la femme ont la peau d'un noir presque ébène tant le rayonnement en altitude est puissant. Ils nous raccompagnent à la voiture. Ces gens n'ont fréquenté aucune école, n'ont lu aucun livre mais de mémoire sont capable de réciter des livres entiers qu'il ont appris d'un parent aujourd'hui disparu. Quand on pense que l'hiver dernier, ils ont eu des nuits où la température est descendu à -40° et que le vent soufflait à plus 100km/h. Je me demande parfois en quoi nous pourrions leur être supérieurs. Leur sourire et leur générosité, je ne les oublierai pas.


Dans les multiples rencontres que nous avons effectuées nous avons été surpris par la beauté de ces regards. Des regards qui n'expriment aucune attention pour notre notre montre ou pour notre caméra, mais nous transpercent comme des flèches. Dans leur pensée, il n'y a pas la moindre idée de savoir si nous avons de l'argent ou non, ou de nous envier. Nous y voyons par contre un reflet d'une certaine beauté de l'âme et alors, nous sommes anéantis, envahis par le sentiment d'une grande tristesse, car nous sentons bien que nous serons incapables d'atteindre une telle sérénité. Ces gens, qui ne disposent de rien ou de si peu, expriment des expressions de bonheur exemptes de toute impureté. Souvent transparaissent même des regards d'une grande intelligence. Comme les voyageurs qui nous ont précédés, nous serons marqués au plus profond de nous même par les paysages et les gens que nous avons découverts ici, et les mots manquent pour en dire plus...


Après les avoir quittés, nous prenons la route qui s'élève vers le col de Shogu la. Les lacets apparaissent à proximité du sommet, la route est recouverte de neige et le chauffeur a des difficultés pour suivre le tracé de la route. Le sommet à 5440m est entièrement couvert de brume et nous manquons le spectacle merveilleux des sommets des hauts plateaux du Nord du Tibet.


Nous descendons vers des plaines où de nombreux nomades vivent toujours à l'écart de toute civilisation, comme le couple que nous avons rencontré.


Nous passons à une certaine distance de deux villages dont les habitations sont dispersées dans la plaine et descendons une large vallée qui 300 kilomètres plus loin aboutit sur le Brahmapoutre.


Vingt kilomètres plus loin, nous quittons cette vallée pour en prendre une autre qui oblique sur la gauche vers le sud. Le temps semble s'améliorer progressivement et en descendant cette nouvelle vallée nous traverserons un certain nombre de petits villages, là où la culture de l'orge est redevenue possible.


Nous pique-niquons au bord de la rivière. Nous redescendons la rivière du Nyemo ma chu.

En arrivant avant Nyemo, la vallée n'est pas très large mais elle devient très cultivée grâce à la rivière qui coule en contrebas. Tous les villages portent le même nom de "Sholeg" ce qui me contrarie car j'avais noté une grande quantité de toponymes sur les cartes chinoises récentes.

La préfecture de Nyemo, dénommée ici Dardrong est restée très tibétaine et aérée comme l'était Pempo. La rue qui traverse la ville serpente un peu entre les habitations. A son extrémité sud quelques bâtiments plus modernes mais qui ne choquent pas. Nous trouvons un guesthouse qui est agréable mais sans eau chaude et avec les toilettes dans la cour. Ici pas de difficulté avec la Sécurité.


Nous reprenons la route en direction du sud et passé le village de Lhundrupgang nous trouvons une piste sur notre gauche qui mène au monastère de Gyeche. Les ruines du précédent, détruit par les Garde Rouges, sont bien visibles sur la colline derrière.

Comme c'est un dimanche, il y a une foule colorée qui nous entoure, comme si toute la vallée s'était donnée rendez-vous là. Il y a deux temples, nous pénétrons dans le second par une pièce latérale. Après la visite, nous reprenons la route vers Dardrong et en obliquant vers les contreforts de la montagne, nous arrivons devant le monastère de nonnes de Pero ani gompa.

Il y a encore foule. Les nonnes récitent et chantent en alternance des textes religieux. Les voix sont mélodieuses et envoutantes. Sur la montagne derrière, une grotte: Pero ritrö. Dans celle-ci, un saint lama donne des consultations privées, et une queue de plus de cent personnes s'est formée. Nous n'allons pas la visiter.


Nous remontons cette large vallée en direction du nord-est jusqu'au village de Sangri qui est au pied de la montagne. Derrière ce village tibétain la voiture nous dépose : une piste abrupte, encore 150m de dénivelé, mène à l'entrée du monastère de Lundrup Tukmonling qui domine toute la vallée.


C'est un monastère ancien, purement Nyingmapa (de l'ancienne religion) car les symboles tantriques y sont nombreux. Ici encore il y a une foule nombreuse et comme dans les chapelles précédentes, des moines récitent des sutras de manière ininterrompue. Un tibétain qui serait correcteur en écritures bouddhistes s'entretient un moment avec nous et nous laisse son adresse. La ferveur religieuse est omniprésente.


Depuis le monastère nous avons une belle vue sur la vallée de Nyemo. Nous redescendons en ville où nous trouvons un petit restaurant. Personne ne se souvient de la présence d'une mission française dans cette région. Nous serions bien restés ici plusieurs jours mais il n’y a plus rien à visiter.


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